Amanda Rosenbach

J'ai dans les yeux un mélange de tristesse et d'audace. Un air effronté, comme diraient certains. On disait de moi dans mon peuple, que je suis une jeune femme intelligente, altruiste et empathique. Toujours prête à aider les autres, à les écouter, quitte à faire passer leurs besoins avant les miens.
D'un naturel fougueux, combatif et déterminé, je n'aurais pas peur de me mesurer à vous, même si vous êtes plus grands ou clairement plus fort que moi. Je ne baisserai pas les yeux devant quelqu'un qui me regarde de haut. Vous pouvez prendre ça pour de l'insolence si vous voulez.
Sachez pourtant que malgré mes apparences de femme sûre d'elle, un peu rebelle, je suis quelqu'un de sensible. Mais c'est quand je me retrouve seule que le masque tombe. Si les larmes doivent couler, elles attendront que le jour décline et que les regards se tournent.
Ma curiosité et mon envie d'apprendre m'ont beaucoup aidé depuis mon plus jeune âge. J'ai appris à chasser, à récolter, à élever mes petits frères, à cuisiner, à m'occuper d'une maison. Je n'ai jamais perdu ces traits de caractère, et ma curiosité, vilain défaut ou non, refait souvent surface. Quand je suis arrivée chez les Viking, j'ai tout de suite essayé de comprendre leur langage, leurs habitudes, et quand je les regarde s’entraîner à combattre, j'ai beau être une femme, je les envie. Agile, et relativement rapide, je suis sûre que je pourrais apprendre...
Pour finir, ne vous attendez pas à ce que je meuble les conversations. J'observe et j'écoute bien plus que je ne parle. De plus, j'ai toujours eu du mal à parler de moi, à me confier sur mes émotions. Il faudrait vraiment que j'ai une confiance absolue en vous pour le faire. Et aujourd'hui, c'est assez difficile pour moi d'accorder ma confiance à quelqu'un. Même à moi. C'est vrai, parfois je me fais peur, je ne reconnais pas.

La naissance et la mort

Je n'oublierai jamais ce jour là. Je prenais soin de ma mère, enceinte de son sixième enfant, autant que je le pouvais. Je faisais tout mon possible pour qu'elle ne se fatigue pas.  Je m'occupais de mes frères, de la cuisine, du ménage, des récoltes. J'étais en train de laver du linge quand elle a poussé un cri. Quand j'ai débarqué, elle a dit que le bébé arrivait. J'ai de suite envoyé le plus âgé de mes frères au village, chercher un médecin. Je me suis occupée d'elle, la rafaîchissant avec une serviette humide et l'allongeant sur sa couche. Je n'avais jamais fait naître un bébé... Ma mère fit presque tout le travail seule, même si j'étais là pour l'encourager, lui tenir la main. Mais elle s'épuisait, et le bébé ne sortait pas traînait à sortir. Lorsque mon frère arriva enfin accompagné du médecin, il était trop tard. Je tenais le bébé, en parfaite santé, le visage contre mon cou, et les larmes ruisselaient sur mon visage. Tous deux comprirent et le médecin se précipita vers elle pour prendre son poul. Il a fait non de la tête, et mon petit frère a éclaté en sanglots. Je serrais le dernier enfant dans mes bras. Il était à la fois celui qui m'avait fait perdre ma mère, et l'une des seules choses qu'il me restait d'elle.

Première chasse

Suite au décès de ma mère, et étant devenue la seule fille de la maison, j'ai du acquitter à temps plein des nombreuses tâches. Je savais déjà tout faire, donc ce n'était pas difficile. Tout, sauf quelque chose, que mon père fait habituellement seul, mais que je décidais d'apprendre : La chasse. J'aimais beaucoup les animaux, mais nous devions avant tout survivre. Je me fis la promesse de toujours tuer pour nos besoins vitaux, et de demander pardon à chacune de mes victimes. Mon père m'emmena alors, me confiant un couteau, et m'apprenant à poser des pièges. J'ai appris vite. Ma première proie était un vieux sanglier. Quand je l'ai achevé, j'ai récité tout bas quelques mots dans l'espoir qu'il me pardonne. Après cela, je suis allée à la chasse régulièrement avec mon père, et même parfois seule. Je revenais toujours avec quelque chose. Et je n'ai jamais fais exception à mes demandes de pardon. Je ne suis pas une sauvage.

- Les chats

Quand je me promenais au village, ou que je m’acquittais des taches extérieures, des chats errants venaient toujours me tenir compagnie. Ils savaient qu'auprès de moi, il obtiendrait de nombreuses caresses, et de gentilles attentions. Quand je le pouvais, je leur donnait des restes de nourriture ou un peu de lait.  Et ils venaient se frotter à mes jambes en ronronnant. Je m'occupais plus de ces petits chats que de moi même.

Un mariage ?

Un jour alors que je rentrais d'une chasse éprouvante, où j'avais été blessée à la jambe en trébuchant contre une souche d'arbre, mon père m'attendait. Il n'était pas comme d'habitude. On aurait dit qu'il avait peur que je réagisse mal face à quelque chose. Je ne comprenais pas. Mais il avait l'air déterminé. Je le questionnais alors. Il me demanda de m’asseoir, et m'annonça que j'allais être mariée. Quoi ? Mariée ? Le mariage ne m'avais jamais effleuré l'esprit. Enfin si, comme tout enfant un peu rêveuse, mais cela remonte à mon plus jeune âge.  Je n'avais jamais imaginé la chose sérieusement. Et encore moins sans que je ne le décide moi même. Je n'étais pas prête à cela. J'essayais de protester, mais l'autorité de mon père était à tout épreuve. Durant des nuits, je faisais des cauchemars.


- Sacrifice et Honneur

Quand les viking sont arrivés sur nos terres, j'ai d’abord supplié mes petits frères de fuir retrouver les nôtres, et de leur dire à quel point je les aimais. Ainsi, ils ne m'ont pas vu partir dans les griffes de ces sauvages. Un sacrifice que je ne regrette pas, car je sais qu'ils sont en vie grâce à cela, même si je suis loin d'eux pour toujours.

- La foi en la vie

Le destin en a voulu ainsi, je n'y peux rien. Tout ce que je peux faire, c'est en faire bon usage. J'aurais pu simplement me laisser mourir sur ce bateau, et en finir directement plutôt que d'affronter un avenir d'esclave. Je n'avais plus personne à protéger, à aimer. Certes, j'y ai songé, mais, j'ai cette fâcheuse tendance à m'accrocher à la vie, toujours convaincue d'y avoir encore quelque chose à faire, même si tout semble perdu. J'avais le sentiment que mon heure n'était pas venue. Alors la tête haute, et les épaules stables, j'ai avancé prudemment dans mon nouveau monde, dans ma nouvelle vie.